En quarante ans, le nombre des migrants dans le monde a triplé. Les notions comme "seuil de tolérance" et "risque migratoire" sont apparues. Des questions se posent sur le statut de ceux à qui le droit d'asile est refusé, sur le nouveau mode de vie entre deux ou plusieurs pays et sur le sens des migrations du Sud vers le sud qui pourraient dépasser celles du Sud vers le nord.
Cet essai rejette l'idée d'une sélection naturelle qui permettrait aux coureurs d'Afrique de l'Est et du Nord d'obtenir tous les succès depuis les années 1980. Il analyse les logiques sociales qui conditionnent la réussite athlétique, notamment l'offre d'un travail dans le domaine de la course à pied, liée à l'émergence du profesionnalisme en Europe au début des années 1980.
Du point de vue de la psychosociologie ou plutôt de la psychologie sociale, les phénomènes de discrimination des générations issues de l'immigration relèvent de catégorisations ou de classements dont la compréhension permet de réduire les effets ségrégatifs. Qu'il s'agisse des comportements des jeunes eux-mêmes ou de ceux des employeurs ou de ceux des intermédiaires sociaux comme l'ANPE, le combat pour l'amélioration du recrutement et de l'accès à l'emploi passe par des formations à la médiation qui inversent les relations dominants-dominés grâce à l'émancipation des valeurs des groupes quand fonctionnent sur un mode endogène des stéréotypes dépréciatifs altérant l'image de soi ou renvoyant à l'absence de même statut social.
L'article suggère quelques pistes de réflexion et de recherches ou cadres d'analyse méthodologique à l'historien sur l'approche historique et origine des 'minorités' et souligne la nécessité pour l'historien de définir un tel concept préhensible sous cinq domaines : communauté, particularités, ethnie, identité, statut. Il aborde également le cadre particulier de l'espace centre-européen.
Les Portugais de France sont absents du discours public sur l'immigration. Leur présence en France passe inaperçue. Quel a été le processus qui a amené les Portugais de France à disparaître de l'espace public français ? L'émigration portugaise vers la France s'envole littéralement dans les années 1960. En un peu plus d'une décennie, les Portugais deviennent la population immigrée la plus nombreuse. Or, apparemment, ils vont chercher, par différents moyens, à se rendre invisibles, à forger d'eux-mêmes une image qui ne puisse pas offrir de prise à l'hostilité de la population du pays d'installation. Maîtriser cette image constitue même l'une des fonctions du grand mouvement associatif qu'ils créent en France. Et, alors que l'on entend parler de moins en moins d'eux, ils structurent leurs micro-sociétés, juxtaposées aux sociétés locales, du moins partiellement. Néanmoins, d'autres recherchent la reconnaissance d'une identité portugaise de France.
Au moment où les résultats des luttes de libération de la femme suscitent de nouvelles interrogations en Europe, quel regard peut-on porter sur l'émancipation de la femme africaine aujourd'hui ? Au-delà du voile, de la consommation de masse et de la recherche des solutions vitales nécessaires aux détresses sociales, un regard sur la condition des femmes noires en France ou en Afrique implique une autre lecture. Une lecture fondée sur la mise au jour des pesanteurs sociales dont les effets conduisent les Afro-métropolitaines à revendiquer inconsciemment leur indépendance par rapport aux hommes.
Etude du mouvement migratoire des Kazaks d'origine polonaise, du Kazakhstan vers la Pologne au début des années quatre-vingt-dix. L'auteur se penche plus particulièrement sur les facteurs susceptibles, soit de faciliter, soit d'entraver le processus d'intégration et d'adaptation de cette population qui fut autrefois déportée de territoires n'appartenant pas à la Pologne vers le Kazakhstan. Elle met l'accent sur les dangers d'une politique progressive de rapatriement des Kazaks suivi de l'octroi de la citoyenneté, risquant de provoquer une vague d'immigration illégale chez les familles séparées ou maintenues dans l'attente.
Sur la base des recherches récentes qui font apparaître l'originalité du cas italien et qui remettent en question les stéréotypes sur l'immigration "passive" des femmes musulmanes et sur la rupture culturelle que la migration est supposé introduire, cet article analyse la complexité des conquêtes d'autonomie des femmes marocaines en Vénétie sur deux niveaux : la variété et le pragmatisme qui caractérisent leurs stratégies migratoires et les recompositions qu'entraîne la migration en termes de rôle et de statut social.
Bien qu'il existe une extrême diversité des situations dans le temps et dans l'espace, le phénomène migratoire manifeste des caractéristiques sociales, économiques, juridiques et politiques qui se retrouvent tout au long de son histoire. Il s'agit d'une sorte de petit commun dénominateur à la condition d'étranger qui serait le produit des catégories mentales de la société d'accueil. L'auteur qualifie de "pensée d'Etat" ces catégories nationales (voire nationalistes), dans la mesure où elles reflètent les structures de l'Etat qui sont intériorisées au plus profond de chaque individu. Le phénomène migratoire ne peut être pensé en sa totalité ni examiné qu'à travers les catégories de la pensée d'Etat. A partir d'une analyse de la double peine ainsi que d'une longue description de la manière dont l'immigré (surtout de basse condition sociale) est tenu à une sorte d'hypercorrection sociale, Sayad considère l'immigration en termes de frontières de l'Etat national même, dans la mesure où la présence de non-nationaux trouble l'intégrité de son ordre.
Il s'agit d'un recueil de matériels qui documentent le travail de formation et d'évaluation réalisé dans le cadre des projets "La médiation linguistico-culturelle dans les services socio-sanitaires du secteur maternel et infantile" ainsi que de "Les femmes relais comme promotrices d'intégration". Sont ici présentées les expériences de stages de formation et d'échanges interculturels auxquelles les formatrices, les médiatrices et les membres de quelques associations de Milan ont participées. Ce texte montre les processus de maturation actifs dans ce domaine en Italie ainsi que la fonction et les tâches des médiatrices culturelles mêmes.
Cet article traite des stratégies identitaires des exilés algériens démocrates installés à Montréal. L'auteur montre qu'à l'intérieur de cette catégorie sociale existe une pluralité de façons de gérer la vie en exil. Les différentes expériences des premières années d'exil des réfugiés algériens montrent que l'exil même n'est pas une situation ponctuelle de persécution, mais un processus de reconstruction de la vie en dehors de son propre pays d'origine. Ce processus de reconstruction se transforme dans le temps sous le double effet de l'évolution des sociétés d'origine et de l'installation.
A partir des matériaux recueillis dans le cadre d'une enquête de l'INSEE et par les sociologues de l'Université Bordeaux-II sur le quartier des Hauts-de-Garonne, l'auteur propose une définition sociologique de ce que l'on nomme aujourd'hui les "classes populaires". En dehors de petites enclaves localisées, les habitants des Hauts-de-Garonne ne forment pas une underclass marginalisée, un autre monde dans lequel s'accumulent toutes les difficultés sociales. En ce sens, la réputation dont souffre ce quartier n'est pas fondée. Cependant il reste que cette réputation pèse sur des individus et des familles qui adhèrent très largement aux modèles culturels des classes moyennes et de la culture de masse. Le sentiment de chute, de pauvreté relative, de fragilité s'impose à près de la moitié de la population. Ce n'est pas le cadre de vie qui pose un problème, il s'agit plutôt de la situation sociale stigmatisée des personnes appartenant aux classes moyennes prolétarisées et dépendantes. L'auteur met en exergue dans quelle mesure la définition de soi bloque la formation d'une culture et d'une communauté populaires quand chacun se range et cherche à se démarquer des autres dans un mécanisme de ségrégation auto-produit. Ceux qui développent des liens plus communautaires sont souvent rejetés parce qu'ils participent de la stigmatisation du quartier, même quand celle-ci est décrite comme injuste.
Etude de la complexité des positions britanniques officielles face au séjour de princes indiens en Angleterre (fin 19e et début 20e). Bref examen des causes des visites princières. Analyse de la nature contradictoire du comportement induit par les priorités impériales (désir de préserver sa suprématie et ses alliances avec l'Inde et de traiter avec des princes "éduqués" selon les valeurs anglaises) et les craintes des effets néfastes pour la Couronne (occidentalisation, destruction de l'ordre féodal, revendication d'indépendance). Le cas particulier des conditions et conséquences du séjour en Europe de quelques princes est étudié, ainsi que la politique de Lord Curzon.